Guinguettes avec vue
(Le restaurant au grand escalier)

Septembre 2016




Avant-propos :

- Aucune information ne sera donnée sur la localisation du site.
- Je ne souhaite pas faire d’échange de lieux.
- Ceci n'est pas un site de photographies mais d'explorations.

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C'est totalement par hasard que je suis tombé sur ce lieu en rentrant du travail. Comme à mon habitude, je scrute les alentours tout en conduisant, lorsque soudain, j'aperçois cette demeure étrange, fermée, avec des panneaux annonçant un projet immobilier. Sur le côté, des ouvriers s'affairent à construire une petite structure destinée à effectuer les ventes des futures propriétés. Je bénis mon travail qui m'amène à sillonner la France et me permet ainsi de découvrir des lieux insolites !

Aujourd'hui, ce sera deux guinguettes. Pour les non franciliens (belle qualité que vous avez là), il s'agit d'un restaurant / cabaret typique de la banlieue parisienne. Son nom vient du Ginguet, un vin blanc bon marché de cette même région. 



Il y a deux bâtiments à explorer. Le problème, c'est qu'il va falloir être discret car un petit groupe d'homme travaille tout en faisant cuire des merguez sur un petit brasero. Les joies du BTP !

J'ai l'air de détonner dans le décor. Je suis en costume, avec des lunettes de soleil, en train de roder autour du bâtiment, prétextant un appel téléphonique pour ne pas éveiller les soupçons. En temps normal, l'entrée doit être facile mais là, c'est un peu différent tant je peux me faire repérer par les voisins, les ouvriers et les voitures qui passent.

En regardant sur Google Maps, je vois qu'il y a un petit parc derrière les deux structures. Direction ce petit bois public qui permet, en passant une ridicule barrière, d'accéder à une entrée simple comme tout. Et qui dit simple comme tout, dit aussi établissement dégradé comme tout. Situé en banlieue sud de Paris, ce lieu a été totalement ravagé par le temps et est intégralement tagué du sol au plafond. Quel désastre !


Après une entrée des plus glauques dans cet environnement où l'on doit piétiner des détritus, je me retrouve face à un escalier qui a été publié il y a quelques jours par un explorateur qui a largement contribué à populariser médiatiquement la pratique appelée Urbex. Le hasard fait bien les choses !


Un escalier central permet de desservir tous les étages de cet ancien restaurant. Un palmier métallique et stylisé tiens encore debout car c'est encore un peu à la mode, mais c'est bien tout ce qu'il reste de la splendeur des lieux.

Malheureusement, il n'y a pas grand chose à voir.


La vue sur la rue principale reste assez chouette même si je ne m'aventure pas trop près des ouvertures pour ne pas me faire remarquer par les ouvriers, fan des saucisses et de vin blanc qui rendent hommage sans le savoir à ce lieu populaire.


Il ne reste que quelques détails qui permettent de situer vaguement les différentes pièces. On trouve une cuisine, des frigos et une salle avec une installation électrique.


En fait, l'intérêt principal de la visite réside dans la vue imprenable que possèdent les deux édifices qui permettent d'avoir une vue sur quatre départements : 75, 91, 92 et 94, soit 45km de panorama ! Un point de vue très très rare si proche de la capitale.




Cela donne très clairement envie d'attendre le coucher du soleil mais l'exploration doit continuer.



Il s'agit d'un ancien restaurant haut de gamme pouvant recevoir jusqu'à 200 personnes (y compris dans des salons privés) dont on ne trouve qu'assez peu d'informations. D'après le panneau de démolition il aurait été construit dans les années 1990 mais cela m'étonne fortement, je le pense bien plus ancien. La société qui porte le même nom à la même adresse a été radiée en 2005, année de la fermeture du lieu suite à la vente de la propriétaire au département.




 


Voici le menu proposé en 2001, date de l'ouverture du site Internet (déjà en Euros) :


Et le menu proposé quelques mois avant la fermeture :


La visite reste expéditive. En redescendant, après un passage dans une salle plus tamisée que les autres, je cherche un petit peu sur le sol pour voir ce qu'il pourrait y avoir comme indice des précédents occupants.


Rien de bien folichon, mais je trouve toutefois le carnet de correspondance d'un ado qui semble s'être perdu ici. Lilian G, si tu me lis... Dois-je le rapporter à son propriétaire ? Quand je lis qu'il est né en 1999, je m'imagine un enfant minuscule, tel un gnome avec son cartable de 192 kg. Alors qu'en fait, le type doit bientôt avoir 18 ans, aura le droit de vote et a sans doute une vie sociale très épanouissante (comme on peut le voir sur sa page facebook). Dois-je lui envoyer un message du style "Coucou, j'aime visiter des guinguettes abandonnées en chemise avec des lunettes de soleil et une moustache et je suis tombé par hasard sur ton carnet de correspondance. J'ai presque le double de ton âge." ? N'aurais-je pas l'air moi même d'un bon gros détraqué à pratiquer des mœurs antisociales adolescentes qui perdurent ?

Devant un tel dilemme, autant le laisser sur place.


Petit détour par l'ancien parking avant de remonter sur la rue pour voir si les ouvriers sont toujours là. Par chance il n'y a plus personne, je vais pouvoir visiter le second restaurant. Il y a deux entrées possible. La première, par la rue, est très séduisante mais problème, un voisin fait sa vidange à l'ancienne sur le trottoir. Repasser par le parc à l'arrière des deux guinguettes ? Non merci. Je décide donc de passer par une petite porte de service, qui amène en dessous des terrasses des deux restaurants. Ce lieu un peu étrange m'amène à devoir faire de la grimpette pour arriver sur les terrasses. 

Après un peu d'escalade, je ne peux que constater que l'autre restaurant est exactement dans le même état que le premier.



On en fait le tour assez vite fait. Toujours pareil, des tags, des pièces vides et pas mal de toiles d'araignées.




Détail très étrange, il y a un arbre dans le restaurant. Pas un petit buisson romantique, non, mais plutôt un gros chêne qui fait penser à l'arbre de Robinson Crusoé qui se trouvait jadis dans une guinguette (mais pas celle-ci).


Je sors tranquillement, non sans immortaliser la plaque des architectes de ce lieu insolite.


Cette seconde guignette date de 1889. Il s'agit en fait d'un pavillon espagnol de l'exposition universelle qui a été déplacé ici et qui servait uniquement des boissons. Parait-il que les clients devaient apporter eux-mêmes leurs repas ! Il terminera restaurant gastronomique 4 étoiles quelques décennies plus tard.




Fait émouvant, en cherchant sur internet, on peut trouver une lettre des propriétaires demandant des vivres pour réaliser le premier réveillon d'après-guerre...


Visiblement, dans son projet d'avenir, la mairie souhaite conserver les aspects initiaux des lieux, mais le projet immobilier est très loin de faire l'unanimité est les riverains se mobilisent pour son annulation... Affaire à suivre !


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