La villa Bismillah

Février 2019



Avant-propos :

- Aucune information ne sera donnée sur la localisation du site.
- Je ne souhaite pas faire d’échange de lieux.

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Les années 30 et les noms de villa qui sentent bon l'orientalisme, il n'y a que ça de vrai ! Le lieu en question, même s'il est plus intéressant à l'extérieur qu'à l'intérieur est quand même digne d'intérêt et entre les châteaux et les villas, j'ai une préférence pour ces dernières. Pourquoi ? J'ai l'impression qu'à travers ce béton massif, on pouvait y voir une certaine harmonie à regard des lignes anguleuses et un minimalisme architectural qui laisse finalement entrevoir un certain idéal de l'habitation et des fonctions sociales qui y sont associées. Si ces thématiques vous intéressent, je ne peux que vous recommander d'aller faire un tour à l'unité d'habitation du Corbusier, à Marseille par exemple, qui vous permettra de voir l'un des plus beaux bâtiment de France dans la plus belle ville de notre pays. Parce que s'il y a un truc qui me met hors de moi c'est d'entendre que c'est une ville de sauvages et surtout, une ville dangereuse. Il faut vraiment ne pas être beaucoup sorti de chez soi pour penser que cette ville craint. Je vous laisse découvrir une vidéo qui montre bien ce qu'est Marseille en vrai.

Je m'égare un peu. 

Avec la villa Bismillah on est dans les prémices du brutalisme architectural, et rien que pour ça, le déplacement est justifié.

Villa traditionnelle dans les années 30, elle fut donnée par sa riche propriétaire à une œuvre pour en faire un centre d'accueil destiné aux enfants délaissés, à partir des années 50. Le bâtiment sera surélevé et totalement métamorphosé à l'intérieur. Il est à l'abandon depuis quelques années tout au plus. L'intérieur a été relativement saccagé et dégradé, mais l'extérieur, compte tenu du vis à vis très important, est dans un état correct.

Et mon Dieu, quelle façade ! L'ajout du balcon est un peu curieux, d'autant plus qu'il a été positionné à l'opposé de la mer et permet donc d'avoir une vue sur la ville, mais indépendamment de son contexte, je suis totalement fan de cette construction.





Comme vous pouvez le voir, une partie des accès sont murés. Qu'à cela ne tienne, grâce à Scott, nous arrivons tant bien que mal à nous faufiler à l'intérieur. Comme j'ai pu le dire en introduction, le lieu n'est pas d'un intérêt fulgurant car toutes les pièces ont été remaniées. Toutefois, un escalier vaguement art déco me fait de l’œil :



Mais pour ce qui est des autres pièces, c'est du lambda insipide, au mieux, vidé, au pire, totalement ravagé.



Mes collègues ont un plan en tête : aller prendre l'apéro et manger un bout en cette fin de journée sur le toit plat de la villa. Et c'est plutôt cool ! Nous montons donc à travers les étages.



Cette petite pause bières + charcuterie face à un coucher de soleil et une vue à couper le souffle fait plaisir. En fait, c'est même délicieux. La compagnie est bonne, l'atmosphère aussi. Que demande le peuple ?
Pour une raison bizarre, je trouve qu'il y a un petit brin de nostalgie dans l'air. Est-ce le fait d'être dans un bâtiment qui tombe en décrépitude à essayer de savourer tant bien que mal quelques instants du monde qui nous persuadent que l'on est encore jeune et que l'on peut s'extraire de la monotonie du quotidien ? Est-ce une manière pour nous d'essayer de rester jeunes ? Pourtant, il n'y a rien de plus ringard qu'un vieux qui tente de jouer au minot. Peut être parce que le sentiment de vivre dans une société aseptisée, uniformisée et avec de moins en moins de saveurs nous pousse à rechercher des moments authentiques. En fait, j'ai déjà eu l'impression de vivre mille fois cette situation depuis mon adolescence. Dans des coins un peu reculés (piste du skate du 77), à être en petit comité et à profiter d'ambiances calmes, comme si le temps s'arrête, le temps de se laisser envahir par la nature et la force des éléments. Le vent, la lumière, la température, l'odeur des bières et du tabac à rouler...
En même temps, à quoi bon se faire des nœuds au cerveau quand on a une vue comme ça ?



Il commence à faire nuit. Et je suis emmerdé. Je kiff bien l'instant, mais je me dis que j'ai encore des heures de route à faire jusqu'à chez moi et ça m'emmerde un peu et qu'il faut que je sois frais pour le boulot. Mais bon, étant banlieusard, j'ai toujours passé mon temps à regarder ma montre pour savoir quand prendre le dernier train pour rentrer dans ma zone pav'.

En descendant de l'échelle qui mène au toit, je ne peux m'empêcher de trouver que la rambarde du balcon possède un sex appel assez soutenu.





Et nous voici de nouveau à l'intérieur pour retourner en bas et sortir gentiment du lieu. Avec les derniers rayons qui s’infiltrent à l'intérieur, les prises ont un peu plus de charme.







Les deux hublots de la villa nous souhaitent bonne continuation.



Nous faisons un petit tour dans le jardin avec ces petites installations pour enfants qui n'ont pas vu un gamin depuis quelques années déjà et ne peuvent que s'animer un peu en fonction des aléas du mistral. "Je suis toujours un peu triste lorsque souffle le vent, car je sais qu'il disperse de la poussière d'enfants."





Petite surprise pour la fin, les restes d'une verrière.



À partir des vues aériennes, on peut constater qu'elle est déglinguée depuis plus de 15 ans.


Et chose très intéressante, on voit un oranger qui pousse malgré tout. Ultime signe de vie face à ce béton et cet abandon. Cela pourrait presque convaincre d'une présence divine ! Et même si je ne bois pas de ce vin là, Bismillah, Dieu est avec toi !

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